En liaison avec une actualité riche, juste quelques réflexions en vrac (en attendant un billet sur la réforme pénale en préparation).
Les discours de Manuel Valls et de Christiane Taubira sont-ils aussi contradictoires que les médias l’affirment ? Pas si sûr…
Quand un militant socialiste applaudit tour à tour les discours économiques de Moscovici et de Montebourg, il est incohérent. Quand il fait de même pour ceux de Valls et de Taubira, il fait peut-être reconnaître une nécessaire complémentarité.
En effet, dans un gouvernement, il est parfaitement normal que les deux grands ministères régaliens que sont l’Intérieur et la Justice s’expriment à travers un discours différent.
Quand Valls dit qu’il n’y a aucune raison valable pour que la loi républicaine ne s’applique pas avec la même rigueur vis-à-vis de chacun sur tout le territoire, il est dans son rôle et, cerise sur le gâteau, il ouvre les yeux à une certaine gauche qui n’a pas toujours l’expérience du terrain.
Quand Taubira propose de développer des alternatives à l’insuffisante et inefficace prison pour certains délits, elle est également dans son rôle et renoue avec le grand dessein des pères fondateurs de la République qui préféraient prévenir et éduquer que guérir… ou punir !
Pour reprendre une formule utilisée (sur un autre thème) sur un blog ami, Valls est plutôt dans le rôle du pompier qui éteint le feu, Taubira dans celui du forestier qui veut prévenir les incendies.
Après, ce sera bien sûr au premier ministre puis au président de décider du niveau où l’on doit bloquer le curseur, en tenant compte des données objectives mais aussi du contexte et des inquiétudes de l’opinion.
Autre remarque : dans le débat sur l’économie, chacun, droite et gauche, défend de vraies convictions. Par contre dans le (faux) débat sécurité/justice, on assiste plutôt à un face-à-face où chacun adopte une posture. En caricaturant un peu : angélisme contre populisme.
En effet, je suis persuadée que les bonnes consciences dogmatiques n’ont qu’une connaissance très limitée de la réalité. A l’inverse, les sécuritaires de droite (et plus particulièrement les élus) hurlent au loup alors que, pour la plupart d’entre eux, ils ne croient pas un mot de ce qu’ils disent mais espèrent cyniquement en toucher un bénéfice électoral.
Aux citoyens de ne pas leur donner raison en allant où on les attend. La démocratie exige aussi des efforts de leur part.
Et voilà ! Quand un(e) politique, ou même une personne qui a simplement de la clture ou un intérêt politique, nous explique que « chacun est dans son rôle », on comprend qu’il nous parle « politique » et « com ». Le problème c’est qu’aux yeux du citoyen ordinaire ça ne passe pas. Lui, y voit une contradiction. Et il n’a pas tort.
Dominique, tout ça pour finir par critiquer l’opposition. Dommage cette conclusion.
Je fais part de mon sentiment : ça n’a rien à voir avec de la com. Libre à toi de ne pas être d’accord. Par ailleurs, tu as manifestement mal interprété ma conclusion : elle ne critique pas que l’opposition (finalement, à la relecture, je trouve qu’elle aurait pu la critiquer davantage).
Ouf !!!! Ennnfin ! je suis éclairée sur ce sujet !!! Merci Dominique !!! 😉
De la bonne utilité du débat. Bien vu Dominique !
Très franchement, je n’aime pas les discours de Valls: j’estime que quitte à se faire le propagandiste de sa propre politique, un ministre dans sa position devrait commencer par rappeler qu’on sort d’une décennie de matraquage médiatique sécuritaire pratiqué par une clique d’imposteurs qui n’a Jamais voulu lutter sérieusement contre la délinquance parce qu’une politique de sécurité efficace, c’est dur et long à mettre en place, ça coûte cher, et en plus ça ne crée pas d’électorat captif:
En 1998, sous Jospin, la France comptait 221.700 policiers et gendarmes pour 58,4 millions d’habitants..
10 ans plus tard, quand après avoir passé six ans à faire dans le verbiage sécuritaire Sarko s’en est allé compter fleurette à Carla Bruni, la France comptait… 222.000 policiers pour 64 millions d’habitants: la population du pays avait augmenté de cinq millions et demi d’habitants, alors que les effectifs de police et de gendarmerie avaient eux augmenté de 300 personnes.
Et que décida à cette époque la Droite au pouvoir? De ne pas remplacer la moitié des policiers et gendarmes qui partaient à la retraite… Et aussi de discrètement redistribuer les effectifs déclinants vers les beaux quartiers des grandes villes parce que quand même, il ne faudrait pas que la bonne société ai à souffrir de la crise, ma bonne dame.
Quand un politicien de droite ressort sa petite rhétorique sécuritaire, la première chose à laquelle il me fait penser, c’est à ces aristocrates de l’Ancien Régime qui rassemblaient leurs sujets sur la place publique, faisaient prendre un mannequin, et déclaraient « Le Criminel Condamné par Contumace est aujourd’hui Exécuté en Effigie: JUSTICE EST FAÎTE« , tant qu’à faire je préférerait que Valls s’abstienne de reproduire le même type de mise en scène.
Merci Dominique pour cette excellente analyse que je partage entièrement. Restant convaincu que tout citoyen peut et doit avoir accès à la connaissance et donc à l’esprit d’analyse , s’il en a la volonté ! Le terme de <> est un terme que je n’aime pas et réfute , il a une connotation un soupçon méprisante et un côté condescendant très faussement utilisé par la droite , mais c’est un autre vaste sujet de débat …
1° : Comme le dit fort justement M. Weppe, « une politique de sécurité efficace, c’est dur et long à mettre en place, ça coûte cher ». Certes, mais en attendant que cette politique se mette en place, on fait quoi ?
2° : Comme toujours très bien informé et soucieux de soutenir son propos par des éléments objectifs, M. Weppe donne des chiffres destinés à démontrer les responsabilités de la présidence Sarkozy dans la montée de la délinquance. (Depuis l’arrivée de Hollande au pouvoir, les policiers massivement affectés au XVIème arrondissement de Paris sous Sarkozy ont-ils été transférés aux cités du 9-3 ?)
Même si, bien entendu, la question des effectifs est loin d’être, en la matière, un élément négligeable, encore faut-il que ces effectifs soient utilisés à bon escient :
– Ex les policiers qui en sont encore à passer du temps dans leur bureau à taper des rapports ou enregistrer des interrogatoires avec deux doigts sur des ordinateurs antédiluviens.
– Ex la mobilisation quasi perpétuelle d’armées entières de policiers, gendarmes, motards, etc. pour encadrer le Tour de France et autres manifestations sportives ou festives.
– Ex le fric et les effectifs consacrés à aller sauver des débiles ( ex. les 65 000 euros dépensés par la collectivité, plus les personnels mobilisés, pour chercher une famille de tordus qui s’était paumée en canoë, puis était rentrée à la maison en abandonnant l’embarcation, et qui a attendu que cela devienne une affaire nationale pour se manifester) et autres conséquences des agissements d’irresponsables considérant que c’est à la société de venir les tirer d ‘affaire quand ils pensent, eux, tout simplement exercer une sorte de « droit au plaisir » (J’ai passé il y a quelques années 2 jours à Chamonix : l’hélico tourne littéralement sans arrêt du lever au coucher du soleil, et l’heure de vol d’un hélico, même au forfait, ça douille !).
Ex les débiles-adolescents attardés qui pratiquent les « sports extrêmes » pour se shooter à l’adrénaline ou exister dans les médias, et qui ne payent pas leur sauvetage.
3° : De plus Je ne suis pas certain qu’une certaine gauche plus ou moins libertaire ne réagirait pas négativement si elle voyait plus de policiers dans la rue, et ne crierait pas, leur presse en écho et leurs élus, en tête, à « l’Etat policier » ou à la « provocation », comme les habitants des cités.
Donc, pour conclure, il est permis de penser que, surtout en période de crise économique, de déficit budgétaire abyssal et d’interventions militaires hasardeuses à l’étranger, cette politique de sécurité efficace, dure et longue à mettre en place et qui coûte cher et que souhaite M. Weppe ne se mettra jamais en place, qu’il aime ou non l’actuel Ministre de l’Intérieur (Il ne rend guère justice à ce fils de républicain espagnol quand il le compare à un noble de l’Ancien régime. Allons, allons, laissons ce genre de rhétorique au sieur Mélenchon, ce défenseur du « Peuple » qui ne se déplace qu’en classe Affaire ou dans son jet privé (Je le cite : « Nous l’avons acheté chez Dassault Industrie. Je connais personnellement les ouvriers qui ont travaillé sur cet avion. Et je sais qu’ils sont très fiers de voir le fruit de leur travail servir une cause juste » (sans rire !) et ce sous prétexte de, je cite encore, pouvoir « se rendre sur n’importe quelle zone de plan social en moins de deux heures »). Tout cela aux frais du contribuable, ouvrier inclus, car quand il dit « « Nous l’avons acheté », « nous », c’est vous et moi.
Ah, ma bonne dame, le Front National a de beaux jours devant lui et ce n’est pas en se voilant la face ou en s’indignant, drapé dans ses certitudes politiquement correctes, son aveuglement et son angélisme, qu’on y changera quelque chose, c’est même tout le contraire.
P.S. : et il va falloir que M. Weppe se fasse à la tête de M. Walls car, à mon humble avis, ce dernier (mais premier dans les sondages) a de fortes chances qu’il soit le candidat du PS contre Sarkozy ou Fillon.
Que de commentaires…. mais personne n’ignore que ce qui accentue les délits, la délinquance, la violence, les réseaux , etc… c’est finalement la crise économique, le chômage, l’exclusion, l’éducation laxiste, le manque de repères, les familles disloquées, les parents dépassés, le rejet, l’appauvrissement, etc. La police ou la justice sont nécessaires, mais n’apportent en rien des solutions concrètes à tous ces problèmes qui constituent la racine même de l’insécurité…
PS : Je veux dire que ce n’est ni le rôle du policier ni celui d’un juge de régler les problème inhérents à la crise économique qui engendrent l’insécurité… Hélas ils interviennent quand c’est trop tard, et ça peut être difficilement autrement. Pour la prévention, leurs champs d’actions sont limités…
Sur le fond, je suis bien d’accord, Cendrillon. Mais, même si les champs d’action sont limités, on peut quand même essayer de limiter les dégâts (en attendant mieux…) en vue de développer une politique de l’application des peines mieux adaptée permettant, par exemple, de limiter la récidive (notamment en améliorant la prise en charge du délinquant à réinsérer).
Oui c’est un bon exemple (si les moyens suivent…). Mais je reste pessimiste sur le fond. Tant qu’il n’y a pas de relance, la dégradation continuera à se faire ressentir à tous les niveaux de la société (et dans tous les secteurs, pas seulement la sécurité). Donc en effet, il faut tenter de ralentir le phénomène, pour limiter les dégâts…