Il y a peu, je me félicitais de l’introduction dans notre système juridictionnel de la Question Prioritaire de Constitutionnalité. La dernière décision en date du Conseil constitutionnel à propos du régime de la garde à vue dans notre procédure pénale confirme tout l’intérêt de ce recours. Jusqu’à présent, rien n’y avait fait et pourtant les avocats étaient nombreux à se plaindre des actuelles dispositions de la loi.
Grâce à une QPC – en fait trente-six sur le même problème de droit – transmise par la Cour de Cassation, le Conseil constitutionnel censure l’ensemble des dispositions du Code de procédure pénale, à savoir les articles 62, 63, 63-1, 77 et 63-4 (les six premiers alinéas), relatives au régime de la garde à vue. Le Conseil a considéré que, compte tenu des réformes de la procédure pénale, le nombre d’instructions ouvertes n’a cessé de diminuer (moins de 3% des jugements) et le plus souvent les personnes poursuivies sont jugées sur la base des seuls éléments de preuve rassemblées avant l’expiration de la garde à vue : on passe de plus en plus fréquemment directement de l’enquête policière à la phase de jugement. Il est donc devenu impératif que la garde à vue soit entourée d’un certain nombre de garanties actuellement absentes de nos textes (notamment la présence autrement que symbolique d’un avocat). C’est d’autant plus vrai qu’il y a aujourd’hui moins d’exigences quant aux conditions d’attribution de la qualité d’officiers de police judiciaire (le nombre de ces derniers n’a fait que croître) susceptibles de mettre quelqu’un en garde à vue. Le gouvernement et le Parlement ont jusqu’au 1er juillet 2011 pour revoir leur copie puisque c’est à cette date que prendra effet la déclaration d’inconstitutionnalité.
Ce n’est pas l’objet de ce billet, mais on ne peut manquer de penser que le Conseil constitutionnel est en train de devenir une véritable Cour suprême telle qu’elle existe dans la plupart des Etats démocratiques (voir en ce sens le billet de Patrick Mottard). Peut-être faudra-t-il alors penser prochainement à modifier le mode de désignation, pour l’instant très politique, de ses membres…
Pas un jour ne passe sans que soit annoncée une nouvelle mesure d’inspiration sécuritaire contraire à notre Constitution. Le Président de la République, qui envisage gaillardement de retirer la nationalité française aux auteurs de certains crimes et délits d’origine étrangère, ne sait-il pas que notre droit ne permet pas de distinguer entre les Français, notamment en fonction de l’origine de leur citoyenneté ? (*) Le Président du CG 06, par ailleurs Monsieur sécurité de l’UMP et député, qui prévoit la possibilité de sanctionner pénalement les parents pour les infractions commises par leurs enfants, ne sait-il pas que la responsabilité pénale pour autrui n’est pas conforme à notre droit ?
Face à ces atteintes, on ne peut que se féliciter de voir se développer le rôle du Conseil constitutionnel. Encore que sur ces sujets, il ne sera vraisemblablement pas nécessaire de soulever un jour une QPC. L’opposition va faire son travail en déposant un recours avant la promulgation de telles lois. Je pense d’ailleurs que cela importe peu au Président de la République : en la matière, il vise le court terme et les effets d’annonce lui suffisent. Jusqu’à présent ça lui a plutôt électoralement réussi. Jusqu’à quand ?
(*) Le Président enfourche également à nouveau et de plus belle son dada à propos des peines plancher. Pourtant, le Conseil constitutionnel a déjà condamné l’automaticité des peines, le 11 juin de cette année, à l’occasion d’une QPC…
Vous avez entièrement raison, le Président de la République ne voit que les articles publiés dans les journaux ou autres sur sa personnalité et sur sa femme . Quand les Français se révoltent, là il fait de nouvelles lois qui rares voient le jour. Il faut penser à tout ce qu’on voit maintenant. Vols, délits, incendies criminels, meurtres. Et les pauvres policiers qui se font tuer pendant leurs services, et qui laissent femmes et enfants, tant de douleur pour ces familles qui souffrent. Il faut faire des lois et les tenir. Les gardes à vue, moi je suis pour. Il faut que la justice soit faite dans les règles, il y a les avocats, les policiers, les juges etc………… Il faut se battre pour la bonne cause et punir ce qui doivent étre punis. Je ne suis peut étre pas sur la bonne longueur, mais je dis ce que je crois juste. Nos enfants, ils grandissent, il faut penser à eux, que vont ils devenir ????? Et que leur réserve l’avenir si on ne fait rien. Il faut appliquer ces lois, pour le bien de l’humanité et de nos enfants.
Corinne, il ne s’agit pas d’être pour ou contre la garde à vue mais de la réserver aux circonstances où elle sert vraiment à quelque chose et en prévoyant les garanties nécessaires aux droits de la défense. Quand on pense à la procédure pénale, il faut essayer se mettre dans la peau d’une personne poursuivie qui serait innocente et qui a donc besoin de la protection du droit.
C’est un très beau billet !
Oui Dominique, c’est vrai qu’il y a des innocents qui sont condannés, j’imagine ce qu’ils doivent ressentir s’ils n’ont rien fait, alors que d’autres qui sont fautifs arrivent à s’en sortir, Je n’étais pas dans la course, là je comprends mieux et les » idées claires ». Ce son de bonnes lois qui aideront les gens innocents . J’avais pas très bien compris, là oui, merci Dominique.
Je ne partage pas le même optimisme sur la position du conseil constititionnel quant à la destitution de nationalité. Il en a déja validé le principe pour des faits de terrorisme.
N’acceptera t’il pas d’autres cas….