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Posts Tagged ‘Congrès de la Mutualité française’

La dernière partie de l’intervention de François Hollande est sans doute celle dans laquelle il a développé les idées les plus ambitieuses dans le but d’améliorer notre système de santé.

SECONDE PRIORITÉ : MODERNISATION DE NOTRE ORGANISATION DE SANTÉ

1. Une politique de santé publique repose d’abord sur la prévention, l’éducation à la santé, la sécurité sanitaire.

L’objectif est de dépenser moins et mieux en améliorant la santé de la population par l’éducation à la santé. Cela suppose d’informer les patients et de mieux former les médecins car la France est en retard en ce domaine : « Moins de médicaments, mieux évalués et mieux connus, mieux prescrits et mieux contrôlés : voilà une exigence de santé publique. »

Et pour que la prévention soit efficace, les actions doivent s’organiser autour de priorités claires. Or notre politique de prévention ne cible pas suffisamment les publics les plus exposés (enfants et jeunes) et ne prend pas assez en compte les risques liés au travail, à la précarité et à l’environnement.

Il faut abandonner la logique des dispositifs fragmentaires et la multiplication des « plans » de santé publique car une prévention efficace doit s’inscrire dans un cadre plus large. La loi de santé publique votée en 2004, qui devait être actualisée cinq ans plus tard, ne l’a pas été. « Je propose donc d’y revenir pour consolider les objectifs, les moyens et les budgets de la prévention, dans la perspective pluriannuelle de la stratégie nationale de santé. »

2. D’autre part, il faut mettre fin aux cloisonnements dans la prise en charge des malades.

La médecine a évolué : développement de le chirurgie ambulatoire, nouveaux traitements transformant des maladies jadis mortelles en maladies chroniques avec lesquelles le patient vivra de nombreuses années. « La médecine de demain sera celle de la personne et non plus de la maladie. »

Cela implique de nouveaux modes d’organisation plus coopératifs, pluridisciplinaires et plus ouverts. Les hôpitaux devront développer de nouvelles manières de travailler avec les autres structures de soins et l’ensemble des médecins de ville pour assurer en permanence des soins de qualité.

Les distinctions entre les soins de ville, l’hôpital et le médico-social n’ont plus de sens quand il s’agit d’assurer une prise en charge globale des patients. « Je demande au gouvernement de réfléchir à une nouvelle architecture de la dépense, qui elle-même doit être maîtrisée et donc évaluée. »

Pour répondre à la demande légitime d’information et de transparence des Français (où se soigner ? à quel coût ? quelle prise en charge ?), il faut « rassembler dans un service unique l’ensemble des données disponibles afin d’offrir à la population et aux professionnels un site public, fiable et exhaustif d’information santé, comme cela a été fait avec l’information retraite. »

Les patients doivent devenir pleinement les acteurs de leur santé : c’est une exigence morale qui illustre la belle idée de « démocratie sanitaire ». Dans le même esprit, les agences sanitaires, qui se sont multipliées, devront évoluer (affaire du Mediator) : nous devons repenser leurs missions, leurs organisations et l’articulation entre elles. Leurs décisions sont trop importantes pour être prises sans y associer les citoyens, concernés au premier chef.

Et de conclure : « C’est une nouvelle politique pour notre système de santé que nous devons porter ensemble. Elle repose sur plusieurs exigences : la qualité des soins, la solidarité dans leur couverture, la responsabilité dans les financements. (…) La santé se situe au point de rencontre des deux impératifs du redressement : la compétitivité et la solidarité. Notre société ne retrouvera confiance en elle-même que si elle fait à la fois le choix de la justice et de la performance. »

S’adressant aux congressistes de la Mutualité française : « Ce choix est aussi le vôtre, depuis des décennies, au service des Français. La solidarité n’est pas seulement une belle idée. Vous avez montré qu’elle pouvait être créative. La solidarité, c’est la condition même de l’engagement, de l’effort, de l’esprit civique, de la cohésion nationale. La solidarité, c’est la force de la France. En ce sens, la Mutualité est une institution de la République ».

(Ovation du public, bien sûr)

P.S. Au moment de publier ce billet, j’apprends qu’un accord vient d’être trouvé entre partenaires sur les dépassements d’honoraires.

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Après le constat, les priorités pour améliorer la situation. Comme promis, voilà la suite de l’intervention de François Hollande au Congrès de la Mutualité française, congrès qui, de surcroît, nous a permis de retrouver de nombreux et vieux amis mutualistes comme les « locaux », René Charrayre-Fest, Joël Derrives et André Arnaudy, et le « Tourangeau » Yannick Lucas, devenu par ailleurs délégué aux finances de la ville de Tours, qui a tenu à nous faire rencontrer Marisol Touraine, également très présente, et pour cause, dans ce congrès.

LA PREMIÈRE PRIORITÉ : L’ACCÈS DE TOUS AUX SOINS

Pour cela, le Président a relevé la nécessité de se préoccuper non seulement de l’assurance-maladie obligatoire mais aussi des complémentaires qui assurent aujourd’hui, pour certains soins, la plus grande partie de la prise en charge des frais engagés par les assurés.

Pour améliorer l’accès aux soins, quatre directions doivent être prises :

1. Généralisation, à l’horizon de 2017, de l’accès à une couverture complémentaire de qualité

Trop de personnes en sont aujourd’hui exclues malgré la CMU et la CMU-Complémentaire (4 millions) et le risque est de laisser le marché libre, cette liberté conduisant à de graves dérives. Préférant l’incitation à l’obligation d’assurance, François Hollande, après avoir rappelé que l’Etat consacre plus de 4 milliards d’aides fiscales et sociales à l’acquisition d’une complémentaire santé, a demandé au gouvernement de réorienter ces aides pour en élargir le nombre des bénéficiaires. En effet, à l’heure actuelle, ces mécanismes profitent davantage à aux cadres de la grande entreprise qu’aux salariés à temps partiel, aux chômeurs, aux retraités, dans l’incapacité de s’offrir une complémentaire santé. « Cette situation représente à la fois un gâchis financier et une injustice ». L’objectif est de traduire ces orientations dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

2. Maîtrise des dépassements d’honoraires

Les dépassements d’honoraires, c’est quelque chose que nous connaissons bien – hélas ! – dans le département des Alpes-Maritimes. Et en France, c’est plus de la moitié des spécialistes qui pratiquent ces dépassements avec parfois des taux exorbitants. Les négociations (auxquelles participe la mutualité) doivent aboutir à un accord avec, pour objectif central, « la diminution progressive mais réelle du reste à charges pour les patients ». Trois principes guident l’Etat :
– la protection des patients par le plafonnement des dépassements ;
– en contrepartie, l’amélioration de la protection sociale des médecins de secteur 2 qui seraient prêts à adopter de nouvelles pratiques ;
– enfin, le soutien à la médecine générale de secteur 1 dont le rôle dans la prise en charge globale des patients doit être mieux reconnu.
Et si la discussion n’aboutissait pas « le gouvernement prendrait toutes ses responsabilités en proposant au Parlement de légiférer ».

3. Lutte contre les déserts médicaux

Les inégalités sont également territoriales : les zones rurales et certains quartiers défavorisés sont touchés. « Pour le cas – important – des soins urgents, j’ai fixé un objectif : aucun Français ne doit se trouver à plus de trente minutes d’un service d’urgence ».

« C’est tout le financement de l’hôpital qui est à revoir (…). La tarification à l’activité n’est qu’un outil. Elle a partiellement atteint ses objectifs ; elle a surtout montré ses limites. Aucun instrument financier, si ingénieux soit-il, ne saurait remplacer une stratégie sanitaire. » Il convient de valoriser les missions spécifiques du service public hospitalier, ses obligations particulières, sociales bien sûr, mais aussi territoriales, scientifiques. Le gouvernement a décidé d’investir dans les hôpitaux et de les aider à diversifier leurs sources de financement. « Le service public hospitalier, de nouveau pleinement reconnu, aura ainsi les moyens de se tourner vers l’avenir. »

La médecine de proximité doit aussi se structurer. « Dans ce domaine, je ne crois pas à la coercition, ni à l’obligation. Je suis favorable à des mesures d’incitation. » Certaines avancées concrètes figurent déjà dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 : création de 200 « praticiens territoriaux de médecine générale », aide financière (« forfait structure ») permettant de couvrir les frais d’une organisation commune entre professionnels de santé, poursuite de l’encouragement des maisons médicales pour permettre aux jeunes professionnels d’exercer leur activité dans un cadre adapté à leurs attentes. « Tout cela doit conduire à une pleine reconnaissance du médecin traitant, évoluant dans un cadre collectif et assuré d’un juste niveau de rémunération. A cette fin, l’extension du système des forfaits et sa modulation en fonction de la densité médicale des territoires permettront de répondre à cet objectif. »

(à suivre, la seconde priorité de François Hollande : la modernisation de notre organisation de santé)

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Comme il nous l’avait annoncé d’emblée, François Hollande n’était pas venu à Nice faire la clôture du Congrès de la Mutualité française pour sacrifier à une tradition inaugurée par François Mitterrand. Il était là pour parler de l’avenir de notre santé publique. Ce fut donc net, précis, et sans bavure. C’est-à-dire, à des années lumière de l’image d’imprécision et d’impuissance que les médias et l’opposition veulent lui coller.

La richesse de son intervention fut telle que je propose aux lecteurs de ce blog une lecture séquencée. Avant de reprendre les priorités qu’il a tenu à développer, son intervention a commencé par un constat sans complaisance. C’est par là que je vais commencer aujourd’hui.

LE CONSTAT

Si, face à la maladie, des progrès majeurs ont été accomplis en termes d’espérance de vie (1er rang européen), de mortalité infantile (l’un des taux les plus bas du monde), l’accès à des soins de qualité pour les plus démunis, le Président a tenu à rappeler que « ces bons résultats cachent de profondes inégalités. Elles sont sociales, territoriales, elles sont parfois liées à l’âge ou au degré de connaissance de notre système de soins ». Et de donner des chiffres : « Un ouvrier de 35 ans a une espérance de vie de 6 ans et demie inférieure à celle d’un cadre du même âge. L’obésité est dix fois plus fréquente (6%) parmi les enfants des classes populaires que chez les enfants des plus favorisés (0,6%). La mortalité des hommes de moins de 65 ans est supérieure de 60% dans le Nord-Pas-de-Calais par rapport à la région Midi-Pyrénées. »

D’autre part, et alors que nos dépenses de santé sont parmi les plus élevées du monde (12% de notre richesse nationale sont consacrés à la santé), ces dépenses « progressent chaque année de 6 milliards d’euros et, dans le même temps, les niveaux de prise en charge par l’assurance-maladie ont reculé, ce qui témoigne d’un évident problème d’organisation qui s’est accompagné d’un recul de la solidarité ».

François Hollande a tenu à rappeler que, durant la dernière décennie, les assurés sociaux ont été largement mis à contribution : franchises, ticket modérateur sur les actes lourds à l’hôpital, vignettes à 15%… Toutes ces réformes conduisent à renvoyer sur les patients des sommes parfois considérables. Le Président en donne trois exemples :
– les restes à charge ont augmenté de 25% pour les médicaments sur les 10 dernières années ;
– les dépenses de soins de ville ne sont plus aujourd’hui prises en charge qu’à hauteur de 55% ;
– un assuré social sur 10 supporte plus de 1000 euros par an de dépenses non remboursées par l’assurance maladie.

Conséquence : « Plus de 15% de nos compatriotes renoncent à se soigner pour des raisons financières. Ils n’étaient que 3% dans cette situation trente ans plus tôt. Je ne me résigne pas à cette situation. Elle appelle une politique de solidarité et de santé publique. C’est-à-dire d’agir sur les mécanismes de couverture de la dépense, mais aussi sur l’organisation même de notre système de santé. »

(à suivre, demain,  les priorités : garantir l’accès de tous aux soins, moderniser notre organisation de la santé).

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