Thérèse, ma mère, nous a quittés le 30 juillet. Ses obsèques ont eu lieu le mercredi 3 août à l’athanée de Nice. Prenant la parole au nom de mes soeurs et de mon frère, j’ai rappelé en ces termes qui était cette femme qui nous a tant donné.
Très chers tous,
Je tiens, au nom de mes sœurs et de mon frère, à vous remercier d’être venus rendre hommage à Thérèse, notre mère, et nous témoigner ainsi votre affection.
Je voudrais commencer par vous lire un petit message. Il a été écrit, dans les heures qui ont suivi le décès de Thérèse, par le plus jeune membre de notre famille, son arrière-petit-fils, Jean-Raymond.
« Mémé, aujourd’hui tu t’en vas. Tu resteras à jamais dans mon cœur, tu seras la personne avec qui j’ai passé les meilleurs moments, de mon enfance à aujourd’hui. Tu as su nous transmettre tes valeurs et ton amour, je ne pourrai jamais les oublier. Tu as su m’apprendre tant de choses avec tant d’amour et tant de passion. Tu étais le pilier d’une grande famille dont tu étais fière. Nous avons passé tant de bons moments ensemble, et malheureusement aussi des difficiles. Aujourd’hui tu t’en vas retrouver pépé, Raymond, ton mari. On vous aime, vous serez toujours avec nous dans nos cœurs. Je t’aime, mémé. »
Ces mots simples résument parfaitement qui était Thérèse et ce qu’elle représentait pour nous tous.
Maman,
Comme il est dur de penser que nous n’aurons plus jamais à prononcer ce nom, ni tous les petits noms dont nous aimions t’affubler. Je ne sais si tu aimais ça car toi-même ce n’est pas tant avec des mots que tu nous témoignais ton amour. Parce que qu’est-ce que tu nous as aimés ! Nous en avons eu chaque jour la preuve tant ta vie nous a été consacrée, à nous, tes enfants et petits-enfants, et à papa, disparu il y a 20 ans. Lui qui était un fervent admirateur de Victor Hugo… et de sa femme, aimait à réciter, devant nous, tes enfants, ce passage d’un poème (Ce siècle avait deux ans) qui te faisait rosir de plaisir :
« Ô l’amour d’une mère ! Amour que nul n’oublie !
Pain merveilleux qu’un dieu partage et multiplie !
Table toujours servie au paternel foyer !
Chacun en a sa part et tous l’ont tout entier ! »
Pour autant, cet amour absolu, ne t’a jamais empêchée d’être tournée vers les autres. Ta vie en témoigne : rien de spectaculaire mais de nombreux gestes qui disaient à quel point tu étais généreuse et charitable. Tu étais prête à investir tes finances (et elles n’étaient pas très grandes) dans toutes les causes : la souffrance des autres t’était insupportable, celles des enfants qui ont faim, des malades, des pauvres… Je ne peux m’empêcher de citer – parce qu’on s’en amusait avec tendresse – le soutien que tu apportais toute l’année à la scolarité des petits indiens Sioux du Dakota pris en charge par l’association Saint-Joseph et ce jusques aux derniers jours de ta vie. Sois rassurée maman, on va prendre le relais. Et bien sûr, ta charité ne se limitait pas à des aides financières. Si tu n’avais pas le temps (avec quatre enfants et un travail !) de t’investir dans des œuvres collectives, dès que tu rencontrais quelqu’un en difficulté, tu payais de ta personne. Cela pouvait aller de l’aide à des démarches administratives à la couture de tenues pour nos copines ou copains d’école moins favorisés ou encore au partage d’un repas… Nous trouvions quelquefois que c’était excessif mais, en vrai, nous étions plutôt fiers de toi.
Et puis, en marge de ton travail dans l’administration de la Jeunesse et des Sports, tous les étés (et même parfois l’hiver), pendant de nombreuses années, tu as dirigé des colonies de vacances, notamment à Annot. Et pas les plus faciles, non, celles avec de très nombreux enfants, celles qui avaient peu de moyens. Tu le faisais avec efficacité et, il faut bien le dire, avec une certaine poigne. Parce que tu n’étais pas, et de loin, ce qu’on aurait pu appeler à l’époque une « faible femme ». Tu avais un caractère certain, qui n’excluait pas quelques poussées de colère, mais une colère qui retombait aussi vite qu’elle était montée. Et nous avons toujours tous pu compter sur toi.
Car tu étais bien notre pilier. Toutes les réunions de famille se sont faites, à l’exception des quelques dernières années, dans l’appartement du Ray. Tu étais une cuisinière hors pair, ne ménageant pas ta peine pour faire plaisir aux uns et aux autres. Tu étais la reine de la cuisine niçoise (ah, tes raviolis, tes petits farcis…) mais pas que. Très ouverte d’esprit, tu t’es aussi essayée avec succès aux autres cuisines régionales et même aux cuisines étrangères. C’est chez toi que je mangeais par exemple le meilleur couscous ou la meilleure paella. Et je suis objective. Tous ceux qui ont eu la chance de goûter à tes plats le confirmeront volontiers. Ce n’est donc pas de ma faute si maintenant on trouve toujours que je suis difficile !
Ces réunions tous ensemble auxquels n’hésitaient pas à se joindre nos amis, les amis de tes enfants dont certains sont aujourd’hui présents, on les faisait aussi souvent, aux beaux jours, dans cette vallée de la Tinée que tu aimais tant, à Roussillon. Tu y cultivais amoureusement ton jardin, tu chouchoutais les arbres fruitiers qui allaient te permettre de nous faire de délicieuses confitures. Et même si au fil des années, le barbecue s’est invité au menu, il était hors de question que tu ne prépares pas quelques plats que nous affectionnions. Nous étions à chaque fois émerveillés par le talent de la cuisinière, la bonne humeur et l’humour de l’hôtesse qui n’hésitait pas à taquiner tel ou tel de ses invités.
Et si nous nous sentions si bien auprès de toi, c’est aussi parce que, même l’âge avançant, tu avais su très naturellement t’adapter à une société qui était pourtant bien différente de celle de ta jeunesse. Tu étais douée d’une compréhension et d’une indulgence que beaucoup venaient chercher auprès de toi. Il est cependant un domaine où elle te faisait défaut cette compréhension : c’est celui du jeu. Tu adorais les jeux de société, notamment les jeux de cartes, jamais tu n’aurais refusé de faire une partie de belote. Mais tu aimais tellement gagner que ça te rendait quelquefois – souvent – d’une mauvaise foi qui nous amusait… et dont certains d’entre nous ont hérité.
Nous ne pourrons jamais oublier tes yeux qui pétillaient le plus souvent de bonheur, qui ne se voilaient que dans les moments les plus tristes. Même durant ces derniers mois qui n’ont pas été faciles pour toi, il leur arrivait de briller, quand tu nous voyais arriver pour te rendre visite, lorsque nous chantions ensemble les vieilles chansons de Michel Sardou. Tu en connaissais beaucoup par cœur, ta voix était claire, presque comme celle d’une jeune fille. Vers la fin, ta voix a fini par s’éteindre, ne prononçant plus que quelques mots : « Ça va, ça va », nous répétais-tu alors. Mais la petite lumière a continué à éclairer tes yeux jusqu’à ce qu’ils se ferment définitivement.
Maman, nous ne t’avons pas perdue. Où qu’elle soit, nous savons que notre petite fée continuera à veiller sur nous. Tu nous as tellement aimés, nous t’avons tant aimée.
Pour mieux connaître Thérèse, on peut consulter quelques billets écrits sur ce blog :
- Roussillon : la vraie fausse maison de famille
- « Cognet Thérèse, épouse Boy : a voté »
- Les chapeaux de Thérèse (et d’Elisabeth)
- Connaissez-vous Narvik ?
- Carrefour du 28 août
Et aussi, ceux écrits sur le blog de Patrick Mottard :
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