C’est peu dire que « mes » mariés de ce jour étaient heureux : leurs sourires éclatants étaient là pour en témoigner. Et leur gaîté était contagieuse : elle a contaminé l’assemblée présente, tellement nombreuse qu’elle a été obligée de s’étirer jusqu’à l’extérieur de la grande salle des mariages de l’Hôtel de Ville.
Résidant pour l’essentiel à Marseille pour des raisons professionnelles, Roxane et Olivier avaient malgré tout tenu à se marier à Nice où ils conservent leurs attaches familiales qui sont anciennes puisque le grand-père de Roxane n’était autre que René Vespa, le prestigieux philatéliste de la rue Gioffredo. L’une de ses filles, adjointe au maire de Louveciennes, était d’ailleurs présente à mes côtés pour nous faire partager l’histoire de ce beau couple.
Un parcours singulier que celui de ces deux brillants artistes photographes : ils se sont rencontrés au Carnaval en 1994 par l’intermédiaire d’un ami commun, Blaise, qui n’était autre – je l’ai découvert lors de la cérémonie – qu’un de mes précédents mariés. Si leurs études respectives les ont par la suite séparés, ils se sont retrouvés « pour de bon » il y a environ cinq ans et ne se sont plus quittés. C’est ainsi qu’ils ont fondé ensemble à Marseille, avec le frère de Roxane et un autre associé, un espace dédié à la Photographie (atelier d’artistes, expositions, formation), « Fermé le lundi ».
Des retrouvailles presque vingt ans plus tard, ce qui m’a fait faire le constat suivant :
« Il faut dire, Roxane et Olivier, que vous n’êtes pas un couple banal. Il y a un certain nombre d’années, le réalisateur Billy Wilder avait tourné avec Marilyn Monroe un film culte intitulé Sept ans de réflexion. Eh bien vous, comme l’a rappelé la tante de la mariée, c’est quasiment trois fois plus fort : presque vingt ans de réflexion ! Comme quoi, Blaise, votre ami commun, avait eu l’œil en vous présentant l’un à l’autre dès 1994 »
Mais il n’était pas question d’oublier que, parmi les présents (famille, témoins, amis…), il y avait un nombre impressionnant de photographes professionnels. Ce qui m’a fait tenir ce propos, vers la fin de mon discours :
« Parce que vous appartenez à l’univers de la photographie (Ô combien !), je n’ai pu éviter de penser au film du grand Michelangelo Antonioni, Blow up. C’est l’histoire de Thomas, un photographe blasé qui est réveillé par les mystères dévoilés sur ses photos. Sur l’une d’entre elles, il découvre au développement un détail dramatique qui lui avait échappé à l’œil nu. Après une errance spatiale et philosophique dans le Londres des Sixties, il finit par conclure : « Ne nous faisons pas d’illusions, alors même qu’elle nous inspire, la réalité est notre pire ennemie… » Une réflexion qui doit, je pense, interpeller votre propre vécu d’artistes.
Et je suis particulièrement à l’aise pour vous souhaiter bonne chance car je suis persuadée que votre couple a tous les atouts pour surmonter les doutes et les contradictions de Thomas. Vous êtes suffisamment de ce monde pour être dans le réel sans le fuir. Mais vous êtes suffisamment artistes pour vous en affranchir et aller voir de l’autre côté du miroir. Le réel, une vie forcément numérique, mais qui jamais n’oubliera l’émotion de l’argentique. »
À la sortie, les nouveaux mariés furent acclamés très joyeusement, avant que l’assemblée ne rejoigne, toujours dans les rires, le lieu réservé pour faire la fête, du côté de la Grande Corniche.
C’est rafraichissant votre article.