Cliquer sur les photos pour les agrandir
Yann Codou, pendant la conférence
Si les « Rendez-vous avec Cimiez » se poursuivent et se ressemblent quant à leur qualité, le choix de l’intervenant imprime à chaque fois une marque différente à ces conférences. Après Bernard Roussel, le merveilleux conteur de la Préhistoire, après Pierre-Antoine Gatier, architecte en chef des monuments historique reconverti en protecteur des Grands Antiques, c’était au tour de Yann Codou, le médiéviste archéologue (UNSA-CEPAM-CNRS), de nous faire franchir les portes de l’espace temps pour nous conduire à l’Abbaye de Saint-Pons et son tombeau-reliquaire. Et toujours en compagnie de Monique Jannet, conservateur du Musée archéologique de Nice, fil rouge incontournable de ces rendez-vous organisés par le Comité de quartier de Cimiez – Rimiez – Brancolar – Scudéri- Cdt Gérôme .
Nous avons beaucoup appris ce soir du 13 mars au CEDAC de Cimiez. En tout cas, j’ai beaucoup appris et d’abord l’importance du monastère de Saint-Pons et son origine médiévale révélée notamment grâce aux travaux de Cais de Pierlas sur le chartrier de Saint-Pons (la première charte connue remonte à l’an 999). Dès le départ, on parle de l’abbaye comme étant située à Cimiez. La construction de l’hôpital Pasteur débutée en 1910 (*), qui a donné son nom à tout le quartier, a oblitéré cette réalité qui imprime l’histoire carolingienne antique de l’abbaye.
Les biens de l’abbaye bénédictine étaient considérables du fait des donations de plusieurs familles nobles et s’étendaient non seulement sur le territoire de l’actuel département des Alpes-Maritimes mais aussi dans les contrées limitrophes (mais elle ne rayonnera guère au-delà de la Provence). Jusque vers le XIVe siècle, où l’on assista à une certaine désagrégation du monastère, l’abbaye fut un grand centre de pouvoir à Nice et Cimiez. Au XIIe siècle, elle possédait la moitié de la ville de Nice et de nombreuses églises y avaient été édifiées : Sainte-Réparate, qui sera donnée à l’Evêché pour en faire la cathédrale de Nice en 1531, la Chapelle de Cimiez qui, avec tous les terrains alentour qui étaient sa propriété, sera cédée aux Franciscains en 1546, ou encore Saint-Barthélemy qui reviendra aux frères mineurs capucins en 1555…
Au-delà de l’histoire des lieux, Yann Codou s’est surtout attardé sur les aspects archéologiques. Les travaux de recherche ont commencé depuis peu et, pour l’heure, l’archéologie nous apporte peu de connaissances sur Saint-Pons. L’église abbatiale a été rasée (si je me souviens bien, au XVIIIe siècle) et les restes sont difficilement observables dans le site de l’hôpital Pasteur. J’ai d’ailleurs appris avec consternation que ce site, potentiellement riche en vestiges, n’a pas plus été protégé lors des actuels travaux d’agrandissement de l’hôpital qu’il ne l’a été à l’époque : on a creusé sans aucune surveillance archéologique…
Les recherches du conférencier de ce soir portent surtout sur le tombeau-reliquaire de Saint-Pons. Il a tenu à remercier Monique Jannet de lui avoir donné accès aux pièces du Musée d’archéologie parmi lesquelles un fragment du tombeau.
Au cœur de l’origine de l’abbaye, on trouve les reliques de Saint-Pons. Dans le monastère, il y avait deux églises : l’une sur le lieu du martyre du Saint (église supérieure), l’autre contenant les reliques (église inférieure correspondant à l’église actuelle). Il semblerait que la première ait été plus vénérée que la seconde.
Certains éléments lapidaires carolingiens du tombeau n’ont pas été détruits lors de la construction de l’actuelle église au XVIIIe siècle. On y trouve une inscription évoquant Charlemagne (dont le passage à Nice semble pourtant plus que douteux aux historiens) et des éléments de cette inscription se trouvent sur trois fragments dont la datation renvoie à 777-778.
Le débat qui suivit la prestation du conférencier montra que quelques spécialistes, notamment de l’histoire médiévale, étaient dans la salle, dispersés au milieu d’un public toujours aussi nombreux et attentif. Ce qui est formidable, c’est cette information qui nous est transmise alors que les études sont en cours, que certaines hypothèses doivent encore être confirmées, et cette impression, du coup, d’être placés aux premières loges.
Bien sûr, comme d’habitude, les organisateurs avaient prévu, au sortir de la salle, une petite collation pour poursuivre, dans la convivialité, la discussion.
Un dernier mot sur le héros de l’histoire ! Il ne saurait en effet être question de terminer ce billet sans rappeler qui était Saint Pons et quel fut son martyre. L’histoire du chevalier romain Pontius se déroule au IIIe siècle. Converti au christianisme, il est obligé de quitter Rome pour fuir les persécutions de l’empereur Valérien. Installé à Cimiez, il sera arrêté par le gouverneur des Gaules et, comme il refusait de se convertir, martyrisé en 257 ou 258. Selon la légende à l’origine de sa sanctification, il aurait résisté au supplice du chevalet (qui se brisa), aux ours dans l’amphithéâtre de Cimiez (qui se retournèrent contre les bourreaux), au bûcher (dont les flammes se détournèrent). Seule la décapitation, sur un rocher au-dessus du Paillon, en vint à bout. Certains prétendent même que sa tête aurait roulé jusqu’au fleuve. Mais ça, je ne le crois pas…
(*) Le monastère Saint-Pons cédé par l’administration des domaines à la ville de Nice en 1908 a d’abord été une annexe de l’hôpital Saint-Roch sous le nom d’hôpital de l’abbaye. Curieux retournement de l’histoire : aujourd’hui, c’est Saint-Roch qui est appelé à disparaître au profit de Pasteur…
Passionnant !!
Merci pour ce compte-rendu qui pallie à mon absence à cette conférence. J’aurais vraiment souhaité y aller si mon quotidien me l’avait permis.
[…] Sur l’origine médiévale de l’abbaye de Saint Pons Quand Saint Pons occupait Cimiez […]
[…] Sur l’origine médiévale de l’abbaye de Saint Pons Quand Saint Pons occupait Cimiez […]
Il se pourrait que le lac St POINT près de Pontarlier dans le Doubs, soit un rapprochement étymologique de St PONTIUS (…)
A un certain moment , on évoque de « pères noirs » et la règle de St Benoit. Le Doubs (voulant dire :noir en celtique), la lac St POINT est bien traversé par cette rivière…
De plus l’apparition de ST Roch est interressante vu que la famille DE la Roche était l’héritère des comte de Bourgogne, soit aussi la Franche-Comté…affaire à suivre !
Merci Bonnot pour ces hypothèses… Un vrai jeu de piste !
[…] du conférencier du jour, Yann Codou, Maître de conférence en archéologie médiévale, qui nous avait alors fait découvrir la riche histoire du monastère de […]